ABI-HENRY : HUIT ANS DE DESTINS CROISES

Cette semaine synonyme de début des vacances de fêtes de fin d’année est aussi synonyme de nostalgie d’un football français peut être définitivement révolu. Ce vendredi, soit 72H après l’annonce officielle de la retraite de Thierry Henry, c’est un autre des derniers grands noms confirmés du ballon rond hexagonal qui se retire. Eric Abidal, 35 ans a lui aussi annonce son retrait de la scène sportive. Même si peu de choses semblent les associer au départ, ces deux géants de notre football ont connu des trajectoires présentant beaucoup de similitudes lors de ces huit dernières saisons, durant lesquelles foot et humanité furent au cœur du jeu. Récit.

  • 2006 : ON VIT ENSEMBLE, ON MEURT ENSEMBLE

france 2006

Les deux joueurs aux origines martiniquaises, leur premier point commun de naissance, firent partie des 23 sélectionnés par Raymond Domenech pour la coupe du monde en Allemagne. Les Bleus se sont qualifiés difficilement à ce 18e mondial . Qualifications qui auront vu l’inattendu retour de Zidane qui a donné cette phrase mythique de l’ex numéro 14 des Gunners : « Dieu est de retour » Abidal n’aura paradoxalement joué aucun match des éliminatoires à ce mondial. Mais sortant d’une grosse saison avec Lyon, le latéral occupera une place de choix dans ce mondial aux débuts poussifs qui verra la nation frappée du coq se qualifier lors du dernier match de poule au profit d’une victoire poussive face au Togo. La France se coltinera le présumé épouvantail de la compétition, l’Espagne qui sortait d’une phase de poule tonitruante et que l’on annonçait précocement comme candidat au titre. Quelques mois après son compère, c’est au tour d’Abidal de lancer la phrase choc en conférence de presse quelques heures avant le match : «  L’Espagne a des joueurs techniques, mais nous on a Zidane, eux ils l’ont pas ». La suite, tout le monde la connaît, 3-1 pour les Bleus avec un ultime but de….Zidane et un énorme match de toute l ‘équipe. Les Bleus échoueront en Finale.mais avec trois minuscules buts encaissés, dont deux dans le jeu, Le quatuor Abidal, Thuram, Gallas, Sagnol (bien épaulé par la paire Maké-Vieira) finira comme l’une des meilleures défenses de la compétition, qui plus est en ayant disputé les 7 matchs promis au finaliste ou au vainqueur. Henry lui sera avec 3 unités, dont le but décisif contre le Brésil sur l’unique passe décisive de Zidane au natif des Ulis (0-1) le meilleur buteur des Bleus à l’issue de la compétition. Le King d’Highbury sera même retenu dans le onze type du tournoi. Tandis qu’Abidal aura effectué un mondial monstrueux, comme l’ensemble de cette nation cru 2006, mais dans l’ombre et la discrétion.

Dieu est de retour – T.Henry

Nous on a Zidane…-E.Abidal

  • 2007-2010 : LA RAZZIA CATALANE

abidal henry barca

Henry effectuera une dernière saison à Arsenal, la première de l’ère Emirates Stadium. Après avoir marqué le dernier but de l’histoire des 93 années d’Highbury, pour un triplé et une victoire pleine d’émotion contre Wigan (4-2). Malgré une saison en demi-teinte marquée par les blessures récurrentes à l’aine ou encore au dos (Il se soignera aux cellules souches de sa jeune fille pour récupérer plus rapidement), Henry parviendra à convertir 10 buts en 17 petits matchs joués. Cette saison mitigée verra l’ancien Roi d’Highbury partir vers le FC Barcelone. Le départ de David Dein aurait influencé son choix, ainsi qu’un futur sportif incertain avec Arsène Wenger. Le natif des Ulis arrivera la même saison que celle de son ami Abi  qui aura tout raflé ou presque, avec Lyon : 2007-2008. Et quelle saison…ratée. Surtout pour un club de cette envergure. Une troisième place en Liga, derrière le Réal et….Villaréal, une demi-finale de Ligue des Champions, ce qui pour 95% des clubs européens serait une superbe performance. Un zéro pointé donc. Mais les deux compères se rattraperont et de quelle manière la saison suivante qui voit la fin d’une ère, celle des Rijkaard, Ronnie, Deco et consorts. Exit l’ancienne école qui a vu le Barca remporter la Ligue des Champions 2006, la première depuis 14 ans. Place à la filière maison, en la personne de Josep Sala Guardiola, ancienne légende made in Masià et qui va révolutionner la footosphère et notamment tous les services statistiques de la Liga et de l’UEFA : des matchs à plus de 70% de possession, plus de 600 passes par matchs, 3 à 4 buts en moyenne/match sur l’ensemble de la saison pour ne citer que ces chiffres. Et la recette ne va pas tarder à se montrer payante, puisque Henry, Abidal et les autres réaliseront une performance encore jamais rééditée : le sextuplé sur la saison 2008-2009 (Liga, Coupe Du Roi, Ligue Des Champions, Supercoupe D’Europe, Supercoupe d’Espagne, Mondial des Clubs). Saison durant laquelle Henry aura claqué 12 buts et délivré 9 passes décisives en 30 matchs dans un poste d’ailier gauche bien différent du rôle occupé à Londres Nord. Et en C1, les stats seront tout aussi épaisses : 12 matchs , 6 buts et 4 passes décisives d’une saison qui verra Messi, en partie grâce à Henry, s’asseoir sur la pyramide du football mondial. Saison qui verra le Barca finir meilleur défense, avec seulement 35 buts encaissés, ce qui est une prouesse dans un championnat ou les attaques s’expriment et dans un club ou le talon d’Achille est bien souvent la défense. Abidal disputera 25 matchs, malgré une blessure handicapante au ménisque. Après avoir touché le firmament, les deux compères pouvaient au mieux rééditer cette performance ou faire un peu moins bien : option 2 avec « seulement » une Liga remportée cette année là. Mais si la chute se résumait à une simple diète de trophées avec le Barca…

  • 2010 : PLUS ON S’ÉLÈVE, ET PLUS DURE SERA LA CHUTE…

France - Reconnaissance Green Point Stadium

Il faut aller à des milliers de kilomètres pour voir les deux compères, jusqu’alors au sommet de leur art, sombrer dans le marasme le plus retentissant de l’histoire du foot français. Nous parlons bien sur de l’affaire Knysna dont Henry sera le symbole le plus criant de l’impuissance et du manque de leadership. C’est un fait, Domenech l’a retenu au dernier moment, plus pour que l’attaquant dispute une quatrième phase finale de suite que pour lui donner un rôle prépondérant d’ancien guidant le reste de la troupe bleue. Un quart d’heure pour le terne nul contre l’Albiceleste (0-0). Sur le banc lors du naufrage final mexicain (0-2) (affaire Anelka, L’Équipe et début du délitement général) et une triste demi-heure lors du coup de massue final contre l’Afrique du Sud. 45 minutes et puis s’en va. Abidal lui aussi traversera ce mondial cauchemardesque comme le spectre du joueur de 2006 qui en faisait l’un des meilleurs arrières au monde. Replacé en charnière, il concèdera le pénalty qui enterra les ultimes illusions françaises au Mexique, celui du 2-0. Il ne jouera pas une minute lors du dernier match de poule, comportant pourtant un mince enjeu de qualification pour les huitièmes. S’en suivra le tapage médiatique, la mutinerie de la honte et les sanctions infligées par la FFF auxquelles Abidal et Henry échapperont. Henry lui quitte la scène internationale lors d’une dernière représentation indigne de sa classe et de son apport au football mondial, lui qui a révolutionné le poste d’avant centre moderne. Ces deux joueurs sont surement ceux, qui, parmi les cadres, n’auraient jamais lancé une telle entreprise d’auto-démolition de la sélection en pleine compétition, au vu de leur professionnalisme et de leur attachement au maillot frappé du coq. Mais les coupable sont peut être ailleurs : Domenech n’aurait probablement pas du retenir un Henry très souvent blessé dans la saison. Mais il faut se rappeler que la qualif’ pour ce mondial a été obtenue en barrages grâce au fameux but de Gallas accompagné d’une main d’Henry qu’on a enfoncé au lieu de protéger, comme il en a été pour Maradona qu’on a consacré en devin après sa mimine en 1986. Triste clap de fin. Pour Abidal, le meilleur est passé.

  • 2010-2014 : EXILS AUX FORTUNES DIVERSES

Thierry Henry Soccer

Henry plus prophète en son pays s’exilera aux États Unis, pays pour lequel il a toujours eu un petit faible. Il choisira la franchise des New York Red Bulls avec laquelle il jouera quatre saisons. Il finira premier de la conférence Est en 2010 et remportera le trophée de la meilleure formation de saison régulière à deux reprises en 2010 et 2013 .Durant cette même année, il glanera l’ESPY Award du meilleur joueur de la MLS. Mais malgré quelques buts d’exception et des statistiques encore au dessus de la moyenne, il ne parviendra pas à remporter le championnat à l’issue des play-offs. Abidal lui connaitra entre temps des heures encore plus sombres, et reviendra sur les terrains avec le Barca sans jamais retrouver son niveau qui avait fait du natif de Saint Genis-Laval un titulaire incontesté. Il imitera son ancien coéquipier, en prenant lui aussi la voie de l’exil, cette fois ci du côté de la Grèce, en rejoignant l’Olympiakos en début de saison, après un retour en demi-teinte dans la maison monégasque qui l’aura vu naitre et avec qui il aura attrapé une 2e place derrière l’intouchable PSG cuvée 2013-2014. Un challenge intéressant pour un club habitué des joutes européennes et qui a bataillé jusqu’à la dernière minute pour une place en huitièmes de l’actuelle Champions League, dans un groupe pourtant relevé avec les présences des deux épouvantails Juventus et Atlético Madrid. Le club du Pirée n’obtiendra finalement que la 3e place synonyme d’Europa League avec 9 points. Et malgré une saison de Super League grecque bien entamée ou l’Olympiakos pointe à la deuxième place à un point du leader, le PAOK Salonique, Abi a décidé de raccrocher les crampons après un exil qui s’est plus apparenté à un dernier désir du jeu, et des sensations procurées par le simple bonheur de humer la pelouse en étant en bonne santé. Car ceci relève déjà du « Miracle Abidal ». L’Olympiakos fût le dernier plaisir du gourmand. Gâterie que le numéro 22 éternel du FC Barcelone n’aurait pu se permettre dans un club devenu trop exigeant pour ses capacités physiques restantes suite à la terrible épreuve qu’il a traversé. En cela, il s’agit déjà une victoire qui ne se limite pas aux traditionnels trois points.

abi grece

  • DÉCEMBRE 2014 : RETRAITE ET HÉRITAGE

L’heure de la retraite a donc sonné pour ces deux géants, une semaine froide et pluvieuse de Décembre 2014. Il y a encore un peu moins de trois ans, Henry effectuait en prêt un retour express à Arsenal digne des plus grands contes de fées, en inscrivant trois buts dont ceux de la victoire en Cup contre Leeds (1-0) peu de temps après son entrée en jeu et contre Sunderland en PL (but du 1-2 dans les derniers instants). Dernière parenthèse enchantée d’une carrière hors norme, qui l’aura consacré meilleur joueur de l’histoire d’Arsenal et meilleur étranger de l’histoire de la Ligue Anglaise. The Telegraph le placera comme le 2e meilleur joueur de l’histoire de la Premier League derrière Ryan Giggs. Il est dans le cercle très élitiste des « champions du monde et meilleur buteur de sélection » (en bonne compagnie, de Pelé et Bobby Charlton notamment)
Mais ce n’est peut être pas toutes ces statistiques déroutantes qu’il faut retenir. Mais toute la symbolique humaniste qui découle de ce parcours croisé entre deux joueurs opposés par le style, le poste occupé et la trajectoire prise par leurs carrières respectives. Car comme nous le savons tous, Eric Abidal fut atteint d’une tumeur au foie en Mars 2011. Une épée de Damoclès autour de laquelle le Barca a montré que sa devise « Mes Que Un Club » (Plus qu’un club) n’était pas qu’une simple arme marketing mais une pure réalité. Comme le montre cette idée des Socios, qui à la 22e minute (en hommage à son numéro) de chaque match, applaudissait en soutien à celui qu’ils aiment appeler affectueusement « Abi ». Comme l’un des nombreux miracles dont seul le foot possède le secret, Abidal reviendra à la compétition un soir de demi-finale de Ligue des Champions, soit moins de deux mois après son intervention. Et l’histoire qui n’était pas encore assez belle, voudra que Barcelone gagne cette édition face à Manchester United. L’ex probable retraité débutera le match comme titulaire et soulèvera le trophée en premier. Il effectuera un an plus tard une rechute qui le poussera à une greffe, avec comme donneur son cousin. Henry très proche de son ex-coéquipier viendra le voir à plusieurs reprises à la clinique « L’Hospital » de Barcelone, pour le soutenir dans cette terrible épreuve. Nous pourrions aujourd’hui parler de ce joueur au passé. Mais le destin et le soutien indéfectible de la planète foot et de ses proches ont surement aidé ce joueur profondément humain. Abidal, c’est celui qui payait ses restaurants lorsqu’il était à Lyon à tous ses coéquipiers. C’est aussi celui qui invitait des coéquipiers à la maison pour souder l’équipe.

abidal maladie
Et pour l’anecdote, lorsque celui-ci jouait à Lille, c’est bien le même Eric Abidal mais bien moins illustre, qui a payé la caution de son ami de banlieue rhodanienne tombé dans la délinquance afin qu’il évite la case prison. Un grand joueur, mais un grand être humain avant tout. Comme quoi il y a une morale, pas toujours vrerifiée sur un terrain. Mais le grand rectangle vert qu’est la vie de tous les jours, lui, a donné justice à Abidal, à défaut d’avoir eu une fin de carrière à la hauteur de sa grandeur humaine. Justice à moitié rétablie pour un joueur hors norme au parcours unique.

Dans les moments de grâce connus en Catalogne comme dans les moments de doute où le simple trophée était le bonheur de se retrouver en vie et en bonne santé, Henry et Abi se sont toujours soutenus mutuellement.

Au plus grand bonheur de nos cœurs, et de nos yeux amateurs de beau jeu.

Thierry Henry, Eric Abidal

Walid Kachour (@WalidKachour – Total-Futbol.com)

BILLET D’HUMEUR BRESILIEN: JOUR 9

NUMERO 6 : UNE FRENCH CONNECTION “GOD LEVEL”

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Oui je sais ce que vous allez dire, il s’enflamme avec son titre…Mais remettons les choses dans leur contexte, je n’utilise pas ce terme pour dire que les Bleus sont les meilleurs de ce mondial et qu’ils vont aller nous chercher leur deuxième Coupe Du Monde. Il est beaucoup trop tôt pour envisager une telle lubie. Je veux d’abord faire référence au son de la pub du mondial tournant en boucle entre les matchs de la marque Adidas. En effet les aficionados de rap américain auront reconnu la voix de Kanye West et son « GOD LEVEL » qui s’annonce comme une future tuerie sur les ondes outre Atlantique. Hormis cela, ce terme à traduire comme le « niveau divin » peut s’appliquer à l’équipe de France. Car au vu des attentes timides nourries par les plus sceptiques du style « passons le premier tour ce sera déjà pas mal » le match fourni par les troupes de DD en cette veille estivale s’est rapproché du « God Level ». En effet, ce 5-2 avec un trio Benzema-Giroud-Valbuena auteurs de ce qu’on pourrait appeler en basket un « double-double » (un but et une passe décisive chacun) fera date si les Bleus parviennent à réaliser un gros parcours au Brésil. Un premier acte de folie, ponctué par trois buts, dont deux en 45 secondes et un pénalty loupé et une transversale de Cabaye . Cette mi-temps reste peut être à mon humble avis la plus belle des bleus lors d’un Mondial depuis la deuxième réalisée contre le Brésil en 2006 en Coupe Du Monde. Mais paradoxalement, deux sentiments m’habitent : l’envie de m’extasier et de me laisser envahir par un sentiment de folie dans un Mondial fou. Ou celui de la prudence au vu de la faible équipe Suisse, aussi trouée qu’un gruyère AOC. Etonnant au vu de la survente que nous en ont fait les médias et les spécialistes. Moi qui m’attendais à une autre opposition que celle du Honduras, j’ai été servi. Mais pas avec la tournure attendue : une formation d’Ottmar Hitzfeld scindée en deux tout au long du match, un milieu qui s’effritait lors de la moindre combinaison de passes et un Benaglio passoire dans les buts. Le premier but de la tête de Giroud certes magnifique aurait pu être évité si la main du gardien avait été plus ferme. La frappe de Matuidi moins d’une minute après au premier poteau était aussi prévisible au niveau de la trajectoire. Rien à dire sur les trois autres buts et la leçon offensive donnée par la suite. Mais c’est cette minute qui a totalement fait tourner le match dans le non entendement. Benzema et ses comparses avaient le feu de Dieu en leur faveur. Mais la question est de savoir si une prestation de ce type notamment dans le domaine offensif est reproductible face à ce que j’appelle les « nations étalons » de cette Coupe, à savoir celles de la zone AmSud qui semblent les plus en harmonie avec l’esprit de jeu qui règne au Brésil. Je pense notamment aux redoutables Chili et Colombie. Voire le Mexique en Amérique centrale. Une prestation de la même facture face à une équipe pareille me laisserait me méprendre à croire à l’exploit d’une équipe à deux doigts de la non qualification il y a encore six mois. Même si 2006 et l’issue fatale m’ont bien amoché et déprimé du football Français au vu des espoirs de grandeurs que j’ai nourri au fil des exploits de Zizou et les siens. Comme disait le rappeur Kool Shen dans le superbe doc « Rendez Vous le 9 Juillet » , « je ne regarderais plus jamais l’équipe de France de la même manière », même si l’amour de cette institution reste intact. Prudence donc même si la part de rêve monte tout doucement. Mais nous savons très bien que les matchs à élimination directe constituent un second tournoi et que le 1/8e de finale symbolise le « Climax » ou le « tournant » dans la vie d’un groupe. Le Paraguay et ce match au couteau en 1998, ou le classique France-Espagne de 2006 qui me donne des frissons rien qu’en écrivant le nom de ces deux nations en sont les plus beaux exemples.

Mais ce qui est sûr, c’est que Deschamps et sa fameuse culture de la gagne sont toujours en parfaite harmonie. Il est en train de réinsuffler une aura de winner à ce groupe, en offrant un jeu basé sur une assise défensive très solide ce soir avec Sakho et Varane et des projections rapides vers l’avant, comme avec Matuidi et Sissoko sur le 5 à 0 qui ont réalisé le « dépassement de fonction » cher à Roger Lemerre. Mais ce qu’il faut noter aussi c’est le coaching gagnant du Bayonnais, avec un 4-3-3 remodelé par les entrées de Sissoko à la place d’un Pogba nerveux et averti contre le Honduras dans le milieu à trois et surtout la titularisation de Giroud dans l’axe de l’attaque déportant Benzema sur la gauche et Griezmann sur le banc, pour offrir une autre alternative en attaque, avec du jeu en remise et de déviation pouvant permettre à Benz et Petit Vélo de s’engouffrer dans les brèches. Deschamps a surement et justement vu la Suisse comme l’adversaire le plus proche sur le papier ce qui fait que le coach a probablement repensé sa tactique en misant sur l’impact physique du Gunner notamment sur les coups de pieds arrêtés dans l’optique d’un match tactiquement cadenassé. Payant puisque le coup de casque de Giroud a permis l’ouverture du score. Sissoko et son volume de jeu ont été rarement mis à contribution mais le Magpie a répondu au défi qui se présentait à lui dans l’entrejeu en étant même au four et au moulin dans les zones dangereuses de récupération du ballon. Il s’est même offert le luxe de marquer le but de la “Manita” d’une frappe croisée imparable. L’entrée de Pogba aboutira même à une passe décisive pour le but du 4-0 de Benzema qui marche lui aussi sur l’eau en ce début de Mondial. Du côté des « Thumbs Up », j’ai beaucoup aimé cette affinité technique Giroud-Valbuena qui se prolonge en dehors du terrain puisque les deux joueurs sont très amis dans la vie. Ce qui transparaissait de comme de l’eau de roche sur la célébration du 3-0.Deux produits du football amateur français quand les Bleus jouaient la finale de 2006 et qui tutoient aujourd’hui le gratin du football international. Beau à voir et exemplaire pour ceux qui veulent croire à leurs rêves de footballeurs. J’ai bien sur aimé Benzema qui a encore planté sa banderille mais qui pourrait déjà en être à six buts en deux matchs si il avait inscrit son pénalty et si l’arbitre n’avait pas stupidement laissé la dernière attaque française se déployer pour ensuite siffler juste avant qu’il n’accroche la filet opposé de Benaglio pour un 6-2 qui sera finalement annulé. C’est juste cela qui me fait rager à sa place, car on a envie de tout croquer quand on dispute à 26 ans son premier mondial et que les occasions de marquer les esprits se présentent. Sakho et Varane ont tenu la baraque même si la blessure du premier est à suivre et sa sortie a malheureusement coïncidé avec le relâchement de la ligne arrière laissant la Suisse inscrire deux buts pour rendre l’addition un peu plus digeste. Ce laxisme de fin de match sera mon « Thumbs Down ». Les Français ont quand même envoyé un petit signal d’alerte à ses concurrents : il faudra les garder du coin de l’œil car ils pourraient débouler dans le rétroviseur des nations favorites. Mais on le sait, la France dans son Histoire n’a jamais aussi bien marché que lorsque personne l’attend. C’est même ce qui fait sa particularité, tant en 1982, qu’en 1998 ou encore en 2006.

« Vivons heureux vivons cachés » comme disait l’illustre Jean Pierre Florian. Maxime encore plus porteuse de sens aujourd’hui pour une équipe qui arrive petit à petit à nous faire cicatriser des plaies encore ouvertes il y a peu de temps et qui nous avait valu d’être la risée du football mondial. A nous Français de redevenir une référence de ce sport. Et ce match en sera peut-être le point de départ.

Après tout, pourquoi pas ? Cela faisait tellement longtemps que l’on s’était pas octroyé le droit de rêver qu’on serait bien bêtes de s’en priver… mais dans la mesure du raisonnable toujours.

Car tout peut être remis en question sur un match. Surtout en Coupe Du Monde.

ON VIT ENSEMBLE, ON MEURT ENSEMBLE – Lilian Thuram, Coupe Du Monde 2006

Walid KACHOUR (@WalidKachour)

Billets d’humeur brésilien : JOUR 3

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NUMERO 3 : GRAND BENZEMA, BON MESSI,PETITS SUISSES.

Hier a eu lieu la troisième journée des phases de poules et l’entrée en lice tant attendue de l’Equipe de France, face à la défensive et agressive selection du Honduras. Le match auquel on s’attendait a bien eu lieu, même si les cinq premières minutes ont vu les Bleus tatônner un peu laissant les joueurs de Suarez passer le rond central et se rapprocher de la zone de vérité gardée par Hugo Lloris. Préssion des débuts sans doute. Par la suite, cela a été un match à sens unique, avec une France à 70% de possession de balle, tandis que Palacios et les siens ont joué la carte du tacle irrégulier et de l’autobus en défense. Ce même Palacios qui prendra un deuxième jaune suite à la répetition de fautes et une charge plus qu’irrégulière dans le dos de Pogba dans la surface de réparation . Ouverture du score de Benzema et première réalisation de l’ex Lyonnais en coupe du Monde a 26 ans. Des la reprise Benz’ croit offrir le but du break sur un caviar de Cabaye mais il frappe l’intérieur du montant droit. Mais Valladares le gardien la remet dans son but en voulant la dégager et 2-0. A dix contre onze et totalement déboussolés tactiquement, le Honduras se contentera de survivre et prendra un troisième but suite à une combinaison sur coup franc qui profite aux cinq mètres à Benzema qui fusille le gardien sous la barre. Aucun réel flop ce soir, mais beaucoup de satisfactions notamment au niveau offensif. Biensur Benzema homme du match avec son quasi coup du chapeau ce soir, un Valbuena toujours aussi transfiguré sous la tunique bleue : remuant, provoquant des fautes et au service de l’animation. Griezmann qui a bien failli marquer à 0-0 avec sa tête sur la barre et à réalisé une très bonne partie pour sa première à enjeu. Le milieu à trois Cabaye-Pogba-Matuidi a surtout souffert de la volonté de l’adversaire à casser du petit bois. L’animation du côté des latéraux Evra et Debuchy est elle aussi à noter. Toutefois certains enseignements sont difficiles à tirer, notamment en défense : la paire Sakho-Varane n’a pas eu à s’employer durant tout le match, excepté une erreur sans conséquence du défenseur de Liverpool quand le score était déjà en poche. De plus le scénario a été avantageux suite à la triple sanction pénalty-carton rouge-ouverture du score. Qui plus est à quelques encablures de la fin de la première mi-temps. Toutefois, les joueurs de DD se sont procurés des occasions en tapant la transversale par deux fois quand les 22 acteurs étaient encore sur la pelouse. Le match contre la Suisse sera la vraie validation de compétences pour ce début de mondial qui part sous les meilleurs auspices. Première victoire en coupe du monde depuis le 5 Juillet 2006 et la demi-finale contre le Portugal 0-1 sur un but de Zinedine Zidane.

Quelques heures plus tôt, les deux prochains adversaires de la France, la Suisse et l’Equateur, ont ouvert le bal dans le groupe E. L’Equateur créant la petite sensation en ouvrant le score par Enner Valencia en début de match. Les Suisses trouveront la faille à la reprise suite à une tête sur corner de Mehmedi, le joueur du SC Fribourg en Bundesliga. Le milieu de terrain profitant d’une affligeante passivité de l’Equateur et notamment le gardien qui n’intervient pas malgré la proximité avec laquelle la balle passe devant lui. Le numéro 18 aurait presque eu le temps de la contrôler, c’est vous dire. Une fin de match plutôt intéressante avec un K-O ambiant de chaque côte et plusieurs balles de match Equateur non concrétisées. Et la sentance arrive à la 93e minute pour les hommes de Rueda avec le coéquipier d’Antoine Griezmann à la Réal Sociedad, Haris Seferovic qui à 20 secondes de la fin réalise le premier hold up de la compétition au terme d’une action rondement menée mais relativement annihilable si les sud-américains avaient mis les ingrédients nécessaires en fin de match : à savoir l’agressivité, le pragmatisme et le replacement intégral. La Nati débute avec une victoire quasi inespérée et s’en sort déjà très très bien. Mais le match contre la France sera surement différent donc gare à un possible excès de confiance.

A minuit et dans le Maracana version 2014 se disputait le premier match du groupe F entre le favori du groupe l’Argentine et l’un des outsiders crédibles de ce groupe, la Bosnie d’Edin Dzeko. L’Argentine connait une entame parfaite avec une ouverture du score chanceuse contre son camp des joueurs de Susic, dès la troisième minute. La premiere mi-temps réalisée par l’Albiceleste est d’une médiocrité étonnante au vu du potentiel, offensif notamment, que comporte cette équipe. Messi rate tout ou presque lors du premier acte et c’est même la Bosnie-Herzégovine qui aurait mérité de rentrer au vestiaires à 1-1 sans un très bon Romero. L’albiceleste se reprendra légèrement en deuxième mi-temps, notamment sous la houlette du trio Di Maria-Aguero-Messi. La Pulga passe la vitesse supérieure et mettra son équipe à l’abri à l’heure de jeu. Le mental aidant encore plus que jamais pour cette édition de la Coupe Du Monde, les joueurs de Sabella enclencheront comme par magie quelques enchainements de bonne qualité, même si le déchet dans l’attaque placée a bien été réel tout au long du match. Les coéquipiers de Miralem Pjanic ont pris un coup sur la tête après le but du break de Messi et sont passés à côté de la première demi heure du second acte. L’entrée de Vedad Ibisevic, l’ex joueur du PSG, de Dijon ou encore d’Hoffenheim a fait du bien puisque c’est lui qui réduira le score à la 84e minute. Trop tard, malgré les trente derniers mètres de Sergio Romero assiègés de manière stérile, ce sont les argentins qui l’emporteront timidement. L’une des satisfactions pour l’Albiceleste sera la prise de responsabilités de la star Messi au moment charnière de la rencontre, insufflant une nouvelle dynamique à l’équipe en fin de partie.

Nous pouvons déjà dresser un mini-bilan de ces trois premiers jours de compétitions qui a vu se disputer onze matchs : hormis la pluie de buts, les stars prennnent déjà les clés du camion chez les grandes nations. Neymar sauveur au Brésil, puis Van Persie-Robben en gourous de la Roja. Drogba déterminant dans la victoire des Elephants. Ou encore Balotelli qui sans donner l’impression de faire d’efforts, marque le but des trois points face à l’Angleterre. Et aujourd’hui Benzema et Messi donc. Les grands ne perdent pas de temps en ce début de Mondial. Un très bon signe.

Au passage, la France a ouvert par un 3-0 sa Coupe Du Monde, comme en 1998 contre l’Afrique du Sud au Vélodrome. Et Tony Parker a glané sa quatrième bague NBA au terme d’une 4e lecon des Spurs infligée au Heat de LeBron James. Simple coincidence du destin ? Peut être pas, croyons à la destinée. Un vent de victoires souffle actuellement sur la France du sport. Espérons que le grain de sable suisse ne vienne pas l’enrayer.

Walid KACHOUR (@WalidKachour)